EMDR
15 April 2023 / EMDR, Emotions, Etat de Stress Post Traumatique, GERER le STRESS / By
Marie-Agnès Thulliez
L' EMDR
Une méthode innovante pour traiter les traumatismes
et encourager la guérison
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In French
En anglais
La thérapie EMDR est un acronyme qui veut dire « Eye Movement Desensitization and Reprocessing » également connu sous le nom de thérapie de désensibilisation et de retraitement par les mouvements oculaires.
C’est une approche psychothérapeutique créée par Francine Shapiro, américaine et docteur en psychologie. Développée en 1989, l’EMDR s’est révélée être efficace pour traiter les troubles liés aux traumatismes, selon des études scientifiques (Van der Kolk et al., 2007).
L’EMDR est une thérapie intégrative qui combine des éléments de différentes approches thérapeutiques telles que les thérapies cognitivo-comportementales, la Gestalt Thérapie, la thérapie centrée sur la personne, les états de conscience modifiés (état hypnotique, pleine conscience) et la psychanalyse ( Shapiro, 2018).
Le modèle de traitement adaptatif de l’information
L’EMDR se fonde sur le modèle du traitement adaptatif de l’information (TAI) (Solomon & Shapiro, 2008). Ce modèle suggère que chaque individu possède un mécanisme physiologique d’adaptation permettant d’absorber et d’intégrer les expériences vécues afin de mieux s’adapter à son environnement.
Ainsi, les aspects bénéfiques de ces expériences sont qualifiés et accessibles pour orienter nos décisions futures. Les expériences sont intégrées dans des réseaux de mémoire préexistants et sont reliées à des expériences similaires, ce qui leur confère une signification (Shapiro, 2001).
Néanmoins, lorsque les événements vécus sont extrêmement perturbateurs ou traumatiques, le processus de TAI peut être entraîné.
Les conséquences négatives qui en résultent sont souvent persistantes et peuvent se traduire par un trouble de stress post-traumatique (TSPT), des troubles dépressifs, anxieux, alimentaires, des addictions ou divers problèmes physiques (Bisson et al., 2013).
Le modèle du TAI considère ainsi le traumatisme comme une entrave au processus adaptatif. Il stipule également que les situations douloureuses actuelles peuvent raviver un événement passé non résolu et non traité, comme par exemple, une personne ayant été
victime d’un accident de voiture, qui ressent de l’anxiété et du stress lorsqu’elle se trouve dans une voiture, ou lorsqu’elle entend
un bruit similaire à celui de l’accident, même des années après.
L’efficacité de l’EMDR
Des études scientifiques ont confirmé l’efficacité de l’EMDR pour le traitement des traumatismes et des troubles post-traumatiques.
Par exemple, une méta-analyse réalisée par Chen et al. (2015) a montré que l’EMDR était plus efficace que d’autres thérapies pour traiter
l’Etat de Stress Post-Traumatique (ESPT).
En outre, des recherches ont indiqué que l’EMDR peut également être bénéfique pour les personnes souffrant de troubles anxieux, dépressifs et alimentaires, ainsi que pour celles ayant des antécédents d’addiction (Shapiro, 2018). En plus de ces troubles, l’EMDR peut être utilisé pour retirer tous les souvenirs d’événements traumatiques qui ont laissé une empreinte douloureuse dans la vie d’une personne, comme une humiliation publique ou une rupture difficile, qui peut causer de l’ anxiogène.
Les phases de l’EMDR
La thérapie EMDR se déroule en 8 étapes, permettant de traiter de manière différenciée et complète les traumatismes et les troubles qui en sont attendus (Shapiro, 2001).
- Histoire du patient et planification.
- Préparation.
- Évaluation et identification des cibles.
- Désensibilisation.
- Installation.
- Exploration des cognitions.
- Clôture de la séance.
- Évaluation de la progression.
La phase de désensibilisation de l’EMDR implique l’utilisation de stimulations bilatérales, telles que des mouvements oculaires, des sons alternés ou des tapotements, pour aider le patient à retraiter les souvenirs traumatiques.
Le patient se concentre sur le souvenir traumatique tout en suivant l’alternative de stimulation choisie avec le thérapeute.
L’EMDR en action

à être un observateur des manifestations psychiques et physiques sans jugement ni retenu. Les associations qui se forment relient les différents éléments en rapport avec l’expérience traumatique et permettent de mettre en relation les croyances irrationnelles négatives, avec des connaissances matures et plus objectives. (Shapiro, 2018).
La métabolisation, la digestion et la dissolution des perceptions négatives initiales et irrationnelles aboutissent à une compréhension adaptée, rationnelle et saine de la situation traumatique. L’efficacité de la méthode est évaluée par la diminution ou l’élimination de la souffrance, ou bien, l’événement ne déclenche plus de peur, d’angoisse ou de souffrance (Shapiro, 2001).
Contrairement aux thérapies comportementales, l’exposition en EMDR ne dure que quelques secondes lors de l’activation du souvenir traumatique en début de phase de retraitement. Bien qu’une séance nécessite l’évocation du traumatisme, il n’est pas obligatoire de le décrire en détail (Shapiro, 2001).
L’EMDR ne supprime pas les souvenirs, mais les retraite pour empêcher les réactions émotionnelles intenses. Le processus dissout les perceptions négatives initiales et irrationnelles et permet de les incorporer de manière adaptative dans la mémoire autobiographique en réduisant la charge émotionnelle négative associée à ces souvenirs traumatiques. Ce processus permet au patient de retrouver un sentiment de sécurité et de contrôle.
Comment fonctionne l’EMDR ?
On se demande souvent comment fonctionne l’EMDR pour produire un effet thérapeutique aussi spectaculaire ? La réponse reste décevante car il n’y a à ce jour pas d’explication exacte. Cette incertitude n’est pas spécifique à l’EMDR, elle est commune à la plupart
des psychothérapies, et il en existe plus de 400. Cependant, L’EMDR est l’une des thérapies pour laquelle il y a eu de très nombreuses recherches. D’autres sont actuellement en cours pour établir des hypothèses intéressantes comme celles qui suit :
Lorsqu’une personne est traumatisée, son système nerveux autonome est activé en réponse au danger perçu. Le système sympathique,
qui est une partie du système nerveux autonome, et responsable de la réponse :
Attaque/fuite/sidération. Il augmente la fréquence cardiaque, la tension artérielle, la respiration et la production d’adrénaline, qui est une hormone de stress. Cela peut empêcher l’intégration adaptative de l’information traumatique.
Lors d’une séance d’EMDR, la stimulation bilatérale permet de synchroniser les deux hémisphères du cerveau, favorisant ainsi l’intégration adaptative de l’information traumatique. Cette stimulation induit également une relaxation profonde, ce qui stimule le fonctionnement parasympathique du cerveau. Le système parasympathique est responsable de la relaxation et de la récupération du corps, et l’acétylcholine est le principal neurotransmetteur de ce système. Elle est impliquée dans de nombreuses fonctions du corps, telles que la contraction musculaire, le rythme cardiaque, la régulation du sommeil et de l’attention, ainsi que la mémoire et les fonctions cognitives. En favorisant le fonctionnement parasympathique et la libération d’acétylcholine, l’EMDR permet une réduction des réactions émotionnelles intenses et persistantes associées aux souvenirs traumatiques (Shapiro, 2001 ; Sack et al., 2008).
L’attitude de “double attention” utilisée dans l’EMDR consiste à être attentif à la fois à ce qui se passe à l’intérieur et à l’extérieur de soi. Cette attitude est similaire à celle utilisée dans la méditation de pleine conscience, où l’on est attentif à ses pensées, émotions et sensations physiques. Cette attitude permet de rester en contact avec ses émotions et ses sensations physiques pendant la phase de retraitement, ce qui est important pour le traitement adaptatif et intégré des souvenirs traumatiques (Shapiro, 2001).
Les sentiments contradictoires qui freinent la guérison !
Lorsque l’on souhaite guérir, il est normal de ressentir des sentiments contradictoires, l’ambivalence est un phénomène humain.
Même si on a conscience de vouloir se soigner, certaines parties de nous peuvent s’opposer à ce changement. Le désir de guérison
est souvent accompagné d’une résistance au changement et implique souvent des modifications importantes dans nos vies, ce qui
peut engendrer de l’anxiété et de l’inquiétude. La thérapie nécessite une alliance solide et sécurisée entre le patient et le thérapeute
pour s’engager en toute confiance dans ce processus de changement et de découverte de soi.
Les études scientifiques
Plusieurs études scientifiques ont été nécessaires pour évaluer l’efficacité de l’EMDR dans le traitement des traumatismes et
des troubles post-traumatiques. Une étude menée par le Pr Bessel Van der Kolk et al. (2007) a comparé l’efficacité de l’EMDR
et celle de la thérapie cognitivo-comportementale pour le traitement du trouble de stress post-traumatique. Les résultats ont
montré que l’EMDR est plus efficace que la thérapie cognitivo-comportementale pour traiter ce trouble.
D’autres études ont également démontré l’efficacité de l’EMDR dans le traitement d’autres troubles tels que l’anxiété, la dépression,
les troubles alimentaires et les antécédents de toxicomanie (Shapiro, 2018). Ces études ont consolidé la place de l’EMDR en tant qu’approche thérapeutique efficace pour le traitement des traumatismes et de leurs conséquences négatives sur la santé mentale
et physique des individus.
Conclusion
L’EMDR est une approche thérapeutique innovante qui a révolutionné la prise en charge des traumatismes et des troubles qui en
découlent. En aidant les patients à retraiter les souvenirs traumatisants et à les intégrer de manière adéquate dans leur mémoire autobiographique, l’EMDR favorise la guérison et contribue à réduire ou éliminer les symptômes liés aux traumatismes.
Cependant, le traitement doit être adapté à chaque patient et supervisé par un professionnel formé et compétent.
Les études scientifiques confirment l’efficacité de l’EMDR dans le traitement des troubles post-traumatiques
(Chen et al., 2015) et d’autres troubles psychologiques, tels que les troubles anxieux, dépressifs et alimentaires
(Shapiro, 2018).
Marie-Agnès Thulliez
Bibliographie :
- En ligne Shapiro, F. (2001). Eye Movement Desensitization and Reprocessing (EMDR): Principes de base, protocoles et procédures (2e éd.). Presse Guilford.
- Van der Kolk, BA, Spinazzola, J., Blaustein, ME, Hopper, JW, Hopper, EK, Korn, DL et Simpson, WB (2007). Un essai clinique randomisé sur la désensibilisation et le retraitement des mouvements oculaires (EMDR), la fluoxétine et la pilule placebo dans le traitement du trouble de stress post-traumatique : effets du traitement et entretien à long terme. Tourillon de psychiatrie clinique, 68(1), 37-46.
- Chen, YR, Huang, MF et Yeh, ML (2015). Efficacité de la désensibilisation et du retraitement des mouvements oculaires chez les patients souffrant de trouble de stress post-traumatique : une méta-analyse d’essais contrôlés randomisés. PloS un, 10(8), e0135173.
- Shapiro, F. (2018). Désensibilisation et retraitement des mouvements oculaires : principes de base, protocoles et procédures. Éditions Guilford.
- Bisson, J., Roberts, NP, Andrew, M., Cooper, R. et Lewis, C. (2013). Thérapies psychologiques pour le trouble de stress post-traumatique chronique (SSPT) chez l’adulte. Base de données Cochrane des revues systématiques, 2013(12). doi : 10.1002/14651858.CD003388.pub4
- Carlson, J., Chemtob, CM, Rusnak, K., Hedlund, NL et Muraoka, MY (1998). Traitement de désensibilisation et de retraitement des mouvements oculaires (EMDR) pour le trouble de stress post-traumatique lié au combat. Journal du stress traumatique, 11(1), 3-24. doi: 10.1023/A:1024464517714
- Lee, CW, & Cuijpers, P. (2013). Une méta-analyse de la contribution des mouvements oculaires dans le traitement des souvenirs émotionnels. Journal de thérapie comportementale et de psychiatrie expérimentale, 44(2), 231-239. doi : 10.1016/j.jbtep.2013.01.007
- Seidler, GH, & Wagner, FE (2006). Comparaison de l’efficacité de l’EMDR et de la thérapie cognitivo-comportementale centrée sur les traumatismes dans le traitement du SSPT : une étude méta-analytique. Médecine psychologique, 36(11), 1515-1522. doi: 10.1017/S0033291706007963